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Page:Stanley - Comment j'ai retrouvé Livingstone, trad Loreau, 1884.djvu/250

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l’ont achetée, qu’elle rend invulnérable, et que, désormais, ils peuvent braver les projectiles de toute espèce.

Triste chose à voir : Tabora livrée aux flammes et ses habitants nous arrivant de toute part.

Voyant que mes hommes étaient disposés à me soutenir, j’ai fait percer des meurtrières dans les murailles de notre tembé. L’exécution en a été prompte et notre demeure a bientôt paru en si bon état de défense, que mes gens se montrent pleins de courage. Des Vouangouana, bien armés, ont sollicité d’y être admis ; les gens de Livingstone ont été priés de se joindre aux nôtres, et ce soir j’ai dans ma cour cent cinquante hommes, distribués sur tous les points où l’on peut craindre une attaque. Mirambo a menacé de venir demain à Kouihara. Dieu veuille qu’il arrive, et qu’il soit à portée de ma carabine, il verra de quelle force est une balle américaine,

23 août. Nous avons passé une triste journée ; tout le monde dans la plus vive inquiétude, les yeux constamment dirigés vers Tabora. On dit qu’il n’y a que trois tembés qui aient résisté à l’attaque. La demeure d’Abid a été détruite, et plus de deux cents dents d’éléphant qui s’y trouvaient sont devenues la proie du Bonaparte africain.

Mon tembé est en aussi bon état de défense que le permettent son genre de construction et les moyens dont je puis disposer. L’enceinte a une ligne continue de meurtrières ; les huttes indigènes qui masquaient la vue ont été rasées, et j’ai fait abattre les buissons et les arbres qui pouvaient abriter l’ennemi. Nous avons de l’eau et des vivres pour six jours, des munitions pour plus d’une quinzaine ; et bien que pour quatre ou cinq cents Européens la chose ne serait pas malaisée ; bien qu’avec du canon, cinquante hommes de race blanche en viendraient facilement à bout, je ne crois pas que dix mille Africains puissent le prendre. Les murs ont trois pieds d’épaisseur ; les chambres sont comme emboîtées à la file les unes des autres, et des gens désespérés s’y battraient jusqu’à ce que la dernière fût prise.

Autour de moi les Arabes s’efforcent de paraître braves, mais il est évident qu’ils ont la mort dans l’âme. J’ai entendu dire que si Tabora était pris, ils partiraient en masse et abandonneraient le pays à Mirambo. Si telle est leur intention et s’ils l’exécutent, je me trouverai dans une belle passe ! Dans tous les cas, Mirambo ne profitera pas de mes valeurs, ni de celles de Livingstone. Si les Arabes déguerpissent, je mettrai le feu à la maison et à tout