Aller au contenu

Page:Stanley - Comment j'ai retrouvé Livingstone, trad Loreau, 1884.djvu/332

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lée du Malagarazi, rivière dont nous étions à une vingtaine de milles.

Un pays populeux ; des villages partout ; les vivres à bas prix ; le lait en abondance, le beurre de bonne qualité.

Après quatre heures de marche, nous avons traversé une rivière, qu’on appelle Kanengi, et nous sommes entrés dans le boma de Kahirigi, village fortifié, dont la population est composée de Vouatousi et de Vouahha.

On nous apprit immédiatement qu’un frère du roi de l’Ouhha demeurait dans ce village, dont il était le chef.

L’annonce fut mal accueillie ; je pressentis un nouveau guêpier.

Effectivement : il n’y avait pas deux heures que nous étions arrivés, lorsque deux Vouangouana entrèrent dans ma tente. Je reconnus deux esclaves de Tani ben Abdallah, notre Fleur des-pois de l’Ounyanyembé. Ces deux hommes venaient de la part du roi pour réclamer le tribut ; ils demandaient trente dotis ; un demi-ballot !

Si j’écrivais les pensées que roula mon esprit en entendant ces paroles, j’en serais choqué plus tard. J’étais d’une colère !… Colère n’est pas le mot ; c’était de la fureur, de la rage — une folie désespérée. Me battre et mourir, plutôt que de céder à ces misérables, Mais en vue de l’Oujiji ! À quatre jours de cet homme blanc, qui doit être Livingstone ! Car c’est lui, à moins qu’il ne se soit dédoublé. — Ciel miséricordieux ! Que faire ?

Plus de tribut, disait Mionvou ; plus de taxe dans l’Ouhha ; c’est une affaire réglée. Et voilà le frère du roi qui me fait sa demande. C’est la dernière, dit-on. Ils me l’ont dit deux fois ; les deux fois ils ont menti. Je ne veux plus être trompé.

D’après les deux Vouangouana, cinq autres chefs sont encore sur la route, à deux heures les uns des autres, et chacun prélève tribut, à l’instar des précédents.

Cette nouvelle m’a donné un certain calme ; il vaut mieux connaître le pire des choses. Savoir tout ce qui est à craindre est toujours un avantage.

Cinq chefs de plus, et nous sommes ruinés ; voilà qui est évident. En face de cette évidence, que nous reste-t-il à faire ? Comment rejoindre Livingstone sans être réduit à la mendicité ?

J’ai renvoyé les deux hommes ; puis j’ai appelé Bombay. Je lui ai dit d’aller, avec Asmani, débattre le honga, et de le régler au plus bas prix possible. Après cela j’ai pris ma pipe, et me coiffant du