Page:Stendhal - Pensées, II, 1931, éd. Martineau.djvu/143

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
142
pensées

Ce degré de stupidité est rare ; un qui l’est moins est de ne pas reconnaître la justice lorsque le même homme est l’accusateur, le juge et l’exécuteur (un exemple d’un seul homme ne me vient pas) ou lorsque les mêmes hommes sont les accusateurs, les juges et les exécuteurs, comme Eschine et Timoléon condamnant à mort le tyran Timophane, frère de ce dernier, et Eschine le mettant à mort. Brutus et ses compagnons mettant à mort le tyran César… etc., etc.

Ou il imaginera 2o que tout homme, condamné par le tribunal de Grenoble, l’est justement (erreur) ou plus généralement que tout homme condamné par jugement est coupable (erreur).

Tous les hommes qui n’ont pas la définition exacte de la justice ou qui ne savent pas appliquer cette définition se trompent plus ou moins.

Ou ivoire blanche. Celui-là serait dans l’erreur qui s’imaginerait qu’il n’y a que l’ivoire qui puisse être blanche. Il faut avoir l’idée de blancheur.

Cette image abstraite (si on partait d’une perception) est d’une singulière espèce. Nous ne la voyons point seule (nous ne voyons point le blanc en général) mais nous ne considérons qu’elle dans les objets blancs sans vouloir voir leurs autres qualités.