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Page:Stendhal - Pensées, II, 1931, éd. Martineau.djvu/159

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pensées

compagnie, je tire donc parti de la passion la plus universelle des Français : la vanité. Voilà pourquoi ce moment (messidor an XII) où le bon ton est de haïrla tyrannie aurait été si heureux pour publier la Filosofia nova.

*

3. Si le philosophe montre ses idées aux hommes vulgaires, en paraissant étonné de ses idées on l’étonne lui-même, en le traitant de fou on l’éloigne toujours un peu de ce qu’on appelle sa chimère (Brissot).

Voilà pourquoi la société de Faure me rendait si malheureux l’année dernière. Il me rendait malheureux et j’offensais profondément sa vanité. Cette année que je garde mes idées pour moi, que je les propose toujours d’une manière modeste à Mante et à Bigillion, je suis plus heureux. Profiter de cet exemple. Dans le monde n’être plus l’homme de mes livres, avoir l’air d’y attacher peu d’importance, en un mot ne pas blesser la passion plus ou moins dominante chez tous mes contemporains si je veux avoir d’eux le moindre plaisir, — or j’en attends beaucoup. Respectons donc la Vanité, et ne donnons jamais ce précepte, ce serait trahir mon secret.