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Page:Stendhal - Pensées, II, 1931, éd. Martineau.djvu/220

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filosofia nova

tendant au même bonheur que nous se trompe de route et nous fait rire), si, dis-je, je ne lui donne pas une bonne tête, je ne puis plus suivre le courant rapide et entraînant d’une passion, il me faut composer de pièces et de morceaux ; au reste, il semble que le profond Molière en ait usé ainsi. Il prenait tout ce qu’il trouvait dans les canevas italiens et employait ensuite tout ce qu’il avait remarqué, les anecdotes ridicules du temps, etc., etc.

Ici il me faut faire un autre point de comparaison. Dans la peinture d’une passion je me disais d’abord cette passion, à son maximum, doit-elle plaire au public ? Si oui, je commençais à peindre. Dans le courant du travail je me disais Ce sentiment est-il le meilleur possible pour peindre la passion ? Ensuite (pour le style) : ce vers est-il dans le rythme le plus convenable ?

Ici c’est tout différent : 1o il me faut déterminer à quel public je prétends plaire, me faire une idée nette de ce public ; 2o à quel degré il faut que mon protagoniste lui semble ridicule. C’est sur ce point-ci[1] qu’il ne faut pas me laisser intimider par les esprits vulgaires. Les dangers

  1. 4 thermidor XII.