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Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, III, 1927, éd. Martineau.djvu/119

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là que la société des gens gais est extrêmement frivole, et que la société des gens actifs a beaucoup de lourdeur. Nos hommes de génie peuvent être admirés par la postérité : mais ils finissent leurs jours d’une manière bien triste, sans connaître d’autres êtres au monde que des auteurs, des libraires et des journalistes[1]. À la vanité littéraire près, la vie de vos d’Alembert et de vos Bailly était aussi gaie que celle de vos seigneurs.

« Cela est encore une des mauvaises conséquences de notre liberté. Nos politiques sont trop affairés pour voir nos gens de lettres, et nos oisifs trop bêtes et trop frivoles. La vanité blessée, ce vice rongeur des savants, s’en augmente, et les discours prononcés dans notre parlement, beaucoup plus raisonnables que les vôtres, sont infiniment plus ennuyeux et plus lourds. C’est un grand bien que l’on ose rire à votre tribune.

« La rencontre du talent et de l’oisiveté est toujours avantageuse à tous les deux. Si les littérateurs donnent des idées aux gens du monde, l’art de vivre, qu’ils apprennent en revanche, les rend plus raisonnables, plus aimables et plus

  1. Le peu d’agrément de notre société explique notre amour pour les déplacements.