Aller au contenu

Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, III, 1927, éd. Martineau.djvu/175

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

paraissent de loin par leurs clochers qui s’élèvent au-dessus des arbres. Le bruit des cloches, adouci par le lointain et les petites vagues du lac, retentit dans les âmes souffrantes. Comment peindre cette émotion ! Il faut aimer les arts ; il faut aimer et être malheureux.

À trois heures, nos barques s’arrêtent dans le port (darsena) de la casa Sommariva, vis-à-vis la villa Melzi. Nos dames avaient besoin de repos ; trois officiers italiens et moi nous avions tourné au sombre ; nous laissons le reste de la troupe, nous traversons le lac en dix minutes, nous voici dans les jardins de la villa Melzi, nous voici à la casa Giulia, qui donne sur l’autre branche du lac, vue sinistre. Nous nous arrêtons à la villa Sfrondata, située au milieu d’un bois de grands arbres, sur le promontoire escarpé qui sépare les deux branches du lac : il a la forme d’un Y renversé. Ces arbres bordent un précipice de cinq cents pieds, donnant à pic sur les eaux. À gauche, sous nos pieds, et de l’autre côté du lac, nous avons le palais Sommariva ; à droite, l’Orrido di Belan ; et devant nous dix lieues de lac. La brise apporte de temps en temps jusqu’à nous les chants des paysans de l’autre rive. Nous avons ce soleil d’aplomb de l’Italie