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Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, III, 1927, éd. Martineau.djvu/35

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blir une fabrique utile et de la faire prospérer, mais d’être le cousin d’un des laquais du pape ou du cardinal-ministre. Ces espérances seraient peu fondées en 1817, je le sais ; mais c’est le gouvernement des deux derniers siècles qui a donné à un peuple très-fin ces funestes maximes de conduite. Tous les artisans qui font fortune à Rome sont étrangers.

Je ne puis obtenir au café du palais Ruspoli, en payant bien à chaque fois, de faire essuyer la table sur laquelle on me sert : les garçons servent comme par grâce ; ils se regardent comme les plus malheureux des hommes d’être obligés de remuer. Tout cela n’empêche pas les Romains de citer cet antre comme le premier café de l’Europe, parce qu’il y a dix-sept salles enfumées qui occupent tout le rez-de-chaussée d’un grand palais. Jamais un Parisien ne pourra se faire d’idée de la saleté romaine. Il y a là des bustes, des marbres, des fenêtres grillées sur un jardin rempli d’orangers chargés d’oranges (février 1817). Tout ce grandiose, couvert de toiles d’araignée et de poussière, jette l’âme dans le tragique.

Tous les palais de Rome ont la même physionomie, et font par conséquent le plus parfait contraste avec Monte-Cavallo, meublé et restauré par les Français.