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Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, III, 1927, éd. Martineau.djvu/63

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flatteuse que celle d’un beau chanteur. Il disait ce soir que jouer ne le fatigue pas plus que faire la conversation. La seule nécessité de l’entendre fait cesser les applaudissements ; et comme cependant il a quelques jaloux, chaque soirée a pour lui l’intérêt piquant d’un drame. Je lui ai répondu que si j’avais à choisir, j’aimerais mieux être lui que les héros qu’il représente. Ce n’était point un compliment.

20 avril. — Je viens enfin de découvrir un Italien qui a un peu de génie original. Le mot imiter semble avoir été créé en faveur de ce pays. Depuis qu’ils ont laissé refroidir le feu que déposa dans leur sein la liberté du quatorzième siècle, et cette jeunesse des âmes sentant le beau après dix siècles de barbarie, circonstance unique et qui ne se présentera plus, ils sont tombés dans le dernier degré du marasme. Le poëte imite le Dante, le prosateur les périodes de Boccace, l’historien le style de Machiavel[1]. Mon homme est tout bonnement un faiseur de libretti pour les théâtres[2]. Ordinairement ses pièces n’ont que deux représentations, parce qu’à la seconde la police les défend. Il a

  1. Monti, Verri, Botta.
  2. Ce mot vaut mieux que de les appeler des poëmes.