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Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, III, 1927, éd. Martineau.djvu/74

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que vous ayez jamais vu. Il arrange avec toute l’élégance possible son habit troué ; le principal fondement de sa cuisine, ce sont des tranches de concombre à la glace ; du reste, vaniteux comme un Castillan, peu lui importe de mourir de faim, pourvu qu’on ne le sache pas. Si on ne lui donne pas de l’ella[1], il est au désespoir. Surtout, il est beau parleur et se pique de ne s’exprimer que dans les termes les plus toscans. Il lui faut trois phrases pour vous demander quelle heure il est.

« Les Florentins vous ont dit que c’est le caractère du peuple de leur pays : la vérité est que c’est celui de toute la nation. Par exemple, M***, etc. »

Cette sortie de mon amant malheureux m’a fait rassembler plusieurs observations faites à Florence. Tous les Florentins sont maigres : on les voit au café faire leur unique déjeuner avec un verre de café au lait et le petit pain le plus exigu, ce qui leur coûte trois gratz (vingt et un centimes). Le soir, chez Vigne, ils dînent pour deux paules et demi ou trois paules (le paule vaut cinquante-cinq centimes). Leur manière de se vêtir a quelque chose

  1. La plus respectueuse des quatre manières d’adresser la parole en italien : Tu, voi, lei, et à Florence : ella.