Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, III, 1927, éd. Martineau.djvu/73

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qu’autant qu’on a le temps de le raconter tout au long, et que je meurs de sommeil, je n’écrirai que ce qui est observation philosophique :

1o Rien n’égale l’air froid et simple de cet homme qui me parlait, et qui a fait des folies inouïes en amour et à la guerre. On ne concevra jamais à Paris la bonhomie de la société italienne, et particulièrement l’air simple des militaires. Cette vanterie égoïste et grossière, que nous appelions blague, parmi les officiers subalternes des régiments, et qui donnait tant d’avantages, y est absolument inconnue.

2o Un étranger qui a passé par une grande ville d’Italie est moins connu par son nom que par celui de la dame qu’il servait. Esser in servitù est le mot, comme amicizia pour amour, et avvicinar una donna pour lui faire la cour.

3o L’homme qui a fait le malheur trop évident de mon ami est un Florentin ; s’il lui faisait une scène, jamais leur maîtresse ne le reverrait. Mon Bolonais me disait : « Êtes-vous allé à Florence ? au petit théâtre d’Ogni Santi ? — Oui. — Y êtes-vous allé un jour où Stenterello jouait ? — Certainement. — Avez-vous remarqué ce caractère ? » C’est l’homme le plus mince et de la figure la plus sèche