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Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/155

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clarée en moi dans ce premier ébranlement, la rêverie romanesque qui m’avait tout envahie, me donnaient un air de gravité au-dessus de mon âge. Comme aussi ma mère, que mon oncle avait priée d’aller dans le monde avec sa jeune femme, ne voulait pas me laisser aux soins d’une dame de compagnie, chez ma grand’mère aveugle, elle me conduisit avec elle au bal, dans les concerts, dans les réunions de la société francfortoise et du Bundestag. C’était un moment très-brillant. Les ambassadeurs accrédités auprès de la diète germanique, que présidait alors le comte de Buol-Schauenstein, ministre d’Autriche, donnaient des fêtes splendides ; le haut commerce et la banque ne restaient pas en arrière : magnificences de toutes sortes, orchestres retentissants, buffets immenses tout chargés de vaisselle d’or, riches livrées, c’était une émulation sans paix ni trêve de plaisirs et de vanités. Un concours extraordinaire de belles personnes, les demoiselles de Buol-Schauenstein, la comtesse de Maltzahn, belle-fille du comte von der Goltz, ministre de Prusse, ma tante Bethmann, madame de Guaita et ses deux sœurs, les demoiselles Schweitzer, les deux filles de la comtesse de Pappenheim, etc., répandaient sur ces assemblées un éclat de vie que toutes les profusions du luxe ne sauraient suppléer là où il manque.

C’était véritablement un monde féerique ; et quand je me le rappelle aujourd’hui, je me demande quelle