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Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/232

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sant, quelle bénédiction céleste ! Des intérêts qui sont le motif vrai du mariage, on en parle peu ou point à la jeune fille.

La jeunesse est idéaliste de sa nature, et, sinon par exception, peu sensible aux biens de la fortune[1]. Cependant un grand nom, un nom héroïque exerce son prestige sur les imaginations. La perspective des bienfaits qu’on peut répandre au moyen de grandes richesses ne s’offre pas sans quelque attrait aux cœurs généreux. Une famille aussi bonne que celle où l’on est née, une maison où règne la concorde, une belle-mère qui est invariablement la perle des belles-mères, enfin le doigt de Dieu visible en tout ceci, et qui, selon l’opinion de tous, a manifestement conduit toutes choses, c’en est assez, c’en est trop pour triompher d’hésitations inconscientes et d’appréhensions vagues qu’on ne saurait ni définir ni même comprendre.

À peine son consentement donné, la jeune fille est étourdie d’un tel concert de félicitations, éblouie de tels présents, ses heures sont à tel point entraînées dans un courant de futilités qui se précipitent, elle devient si entièrement la proie des faiseuses et des marchandes, on lui parle si constamment de dentelles et de diamants, d’équipages, de présentation à la cour et de visites de noce, qu’il n’y a plus pour elle aucun

  1. Ceci fera sourire les jeunes filles d’aujourd’hui. (Note écrite en 1869.)