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Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/281

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dignité tranquille qui se lisait au front de Louis XVIII, ôtaient, dès qu’il paraissait en public, malgré sa fâcheuse impotence et la bizarrerie de son accoutrement, toute possibilité, toute envie de le trouver ridicule.

Je vis Louis XVIII deux fois, en deux occasions solennelles. Une première fois d’assez loin, à son balcon, où il assistait, le 2 décembre 1823, entouré des princes et des princesses, à l’entrée triomphale dans le jardin des Tuileries de monseigneur le duc d’Angoulême et des régiments de la garde, qui revenaient victorieux de la campagne d’Espagne ; une autre fois le 23 mars de l’année suivante, à l’ouverture de la session qui devait être la dernière de son règne.

La cérémonie se faisait en grand appareil, au Louvre, dans la salle des gardes, en présence de toute la cour. Il y avait des places réservées aux dames présentées ; d’autres plus en arrière, où étaient admises les personnes non reçues au château. Le spectacle était pour moi tout nouveau. Il fut très-grave. Le vieux roi — il avait alors près de soixante-dix ans, — vêtu selon sa coutume du frac en drap bleu orné de deux épaulettes d’or, couvert des plaques de ses ordres, la chevelure poudrée, renfermée derrière la nuque dans un ruban de soie noire, le chapeau relevé, à trois cornes, l’épée au côté, ses jambes enflées enveloppées de larges guêtres en velours cramoisi, entra, roulé par ses pages, dans son fauteuil, entouré