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Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/289

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n’avais-je pas vu cela ? » dit la vicomtesse en me regardant à son tour, sans montrer le moindre étonnement du singulier accueil de sa princesse. Mais que faire ? il n’y avait point de remède ; on venait nous avertir que les appartements du roi s’ouvraient.

À cinq minutes de là, la vicomtesse, la duchesse de Montmorency et moi, toutes trois en ligne, nous faisions notre triple, profonde et lente révérence à la Majesté du roi Charles X.

Le spectacle devait être pompeux, de ces trois grandes dames en gala, s’avançant à pas comptés dans cette galerie resplendissante, vers un groupe de grands seigneurs tout chamarrés d’or, qui faisaient cortège au plus grand seigneur entre tous, à Charles de Bourbon, par la grâce de Dieu et de ses ancêtres, très-auguste et très-puissant roi de France et de Navarre.

Charles X, bien qu’il eût alors soixante-dix ans, gardait encore un certain air de jeunesse, avec ce je ne sais quoi indéfinissable du gentilhomme français, lorsqu’il a été très-aimé des femmes. Sa taille était mince, souple, élancée. Ni dans l’ovale maigre et allongé de son visage, ni dans son front fuyant, ni dans son regard indécis, ni même dans ses cheveux blancs, il n’y avait de beauté ou d’autorité véritables ; mais l’ensemble de tout cela paraissait noble et gracieux.

On vantait beaucoup aux Tuileries l’affabilité de la parole royale. On répétait des mots du roi. Les avait-