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Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/131

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« Je suis convaincu, Yorick, continua mon père, (moitié lisant, moitié discourant) qu’il existe au nord-ouest un passage au monde intellectuel, et que l’esprit humain, en puisant en lui-même toutes ses connoissances, trouveroit pour les acquérir une méthode beaucoup plus facile que celle qu’on a coutume d’employer. — Mais hélas, tous les champs n’ont pas une source ou un ruisseau pour les arroser ; tous les enfans, Yorick, n’ont pas un père capable de les diriger ». —

« Tout, ajouta mon père en baissant la voix, tout dépend entièrement des verbes auxiliaires, monsieur Yorick ». —

Si Yorick eût marché sur le serpent décrit par Virgile, il n’auroit pas témoigné plus d’effroi. — « Je suis étonné moi-même, dit mon père qui s’en aperçut (et je le cite comme une des plus grandes calamités qui soient jamais arrivées à la république des lettres), — je suis étonné que ceux qui jusqu’ici ont été chargés de l’éducation de la jeunesse, et dont l’unique devoir étoit d’ouvrir l’esprit des enfans, de leur faire de bonne heure un magasin d’idées, et de laisser ensuite leur imagination travailler en liberté sur ces idées ; — je suis étonné, dis-je, Yorick, que ces gens-là se soient aussi peu servi des