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Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/150

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CHAPITRE L.

Histoire de Lefèvre.


C’étoit pendant l’été de l’année où Dendermonde fut pris par les alliés, — c’est-à-dire, environ sept ans avant que mon père vînt habiter la campagne, et environ sept ans après que mon oncle Tobie et Trim s’y furent secrètement retirés, dans le dessein d’exécuter quelques-uns des plus beaux sièges qu’ils avoient en tête.

Mon oncle Tobie étoit un soir à souper, et Trim étoit assis derrière lui près d’un petit buffet. — Je dis assis, car, par égard pour son genou blessé, dont le caporal souffroit quelquefois excessivement, toutes les fois que mon oncle Tobie dînoit ou soupoit seul, il ne souffroit pas que le caporal se tînt debout. Mais la vénération du pauvre garçon pour son maître lui opposoit une résistance opiniâtre. — Mon oncle Tobie, avec une artillerie convenable, auroit eu moins de peine à s’emparer de Dendermonde. — Souvent, au moment qu’il croyoit le caporal assis, si mon oncle Tobie venoit à retourner la tête, il l’apercevoit debout derrière lui, avec toutes, les marques du respect le plus soumis.