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Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/151

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Cela seul engendra plus de petites querelles entr’eux, pendant vingt cinq ans entiers, que tout autre sujet. — Mais à quoi cela revient-il ? qu’est-ce que cela fait à mon histoire ? pourquoi en fais-je mention ? — Demandez-le à ma plume ; c’est elle qui me gouverne, je ne la gouverne pas. —

Mon oncle Tobie étoit donc un soir à souper, quand le maître d’une petite auberge du village entra dans la salle avec une fiole vide à la main, pour demander un verre ou deux de vin de Madère. — « C’est, dit-il, pour un pauvre gentilhomme qui est arrivé malade dans ma maison il y a quatre jours. Depuis ce temps, il n’a pu soulever sa tête, ni manger, ni boire, ni goûter de quoi que ce soit au monde ; mais tout à l’heure il vient de lui prendre fantaisie d’un verre de Madère sec et d’une petite rôtie. — Il me semble, a-t-il dit en ôtant sa main de dessus son front, que cela me soulageroit. —

» Je suis venu chez le capitaine, ajouta l’aubergiste, persuadé qu’il ne me refusera pas si peu de chose. Mais si je ne trouvois personne qui voulût m’en donner, m’en prêter ou m’en vendre, — je crois que j’en volerois, plutôt que de ne pas en rapporter à ce pauvre gentilhomme. — Il est en vérité bien malade.