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Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/157

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sine pour ordonner la petite rôtie dont l’aubergiste avoit parlé. — Mais je veux, a-t-il dit, je veux la faire moi-même. — Permettez, lui ai-je dit, en lui offrant ma chaise pour le faire asseoir auprès du feu, — permettez, mon jeune gentilhomme, que je vous en évite la peine. — En même-temps j’ai pris une fourchette pour faire griller la rôtie. — Je crois, monsieur, a dit le jeune homme d’un air tout-à-fait modeste, que mon père l’aimera mieux de ma façon. — Je suis sûr, ai-je répondu, que sa seigneurie ne trouvera pas la rôtie plus mauvaise de la façon d’un vieux soldat. — Le jeune homme m’a pris la main, et aussitôt a fondu en larmes. » —

« Pauvre enfant ! dit mon oncle Tobie, il a été élevé dans l’armée depuis le berceau ; et le nom d’un soldat, Trim, sonne à ses oreilles comme le nom d’un ami. — Je voudrois l’avoir ici. —

» Dans les plus longues marches de l’armée, continua le caporal, dans le besoin le plus pressant, je n’ai jamais eu autant d’impatience pour mon dîner, que j’en ai ressenti aujourd’hui pour pleurer de compagnie avec ce jeune homme. — Mais, je le demande à monsieur, en quoi la chose me touchoit-elle ? — En rien au monde, Trim, dit mon oncle