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Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/20

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mesures de raves à vingt livres, — une excellente récolte de froment l’année suivante ; — et l’année d’après, cent (pour ne rien exagérer), mais, suivant toute vraisemblance, cent cinquante, sinon deux cents quartauts de poids et de fèves, — et ensuite des patates sans fin. — Mais alors, venant à penser que, pour manger des patates, il falloit se résoudre à laisser mon frère sans éducation, sa tête se troubloit derechef ; et finalement le vieux gentilhomme étoit dans un tel état d’embarras, d’indécision et d’incertitude, comme il l’a souvent déclaré à mon oncle Tobie, qu’il ne savoit, non plus que ses talons, ce qu’il avoit à faire. —

Il faut l’avoir éprouvé, pour concevoir quel tourment c’est pour un homme, de se sentir ainsi tiraillé par deux projets, tous deux également pressans, et tous deux entièrement opposés. — Car sans compter le ravage qui en résulte nécessairement dans tout le système des nerfs, desquels la fonction, comme vous savez, est de conduire les esprits animaux, et les sucs les plus subtils, du cœur à la tête, et de la tête au cœur, — on ne sauroit croire l’effet prodigieux qu’une lutte si terrible opère sur les parties plus solides et plus grossières, détruisant l’embonpoint,