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Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/242

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personnage que je cherche ; voyons ailleurs. »

« — Tu l’as échappé belle, Tristram, me dit Eugène, en me prenant la main, après que j’eus fini mon histoire. » —

« Je ne tiens rien encore, Eugène, répliquai-je ; et puisque l’infâme bâtarde a découvert mon logis… » —

« Bâtarde est le mot, interrompit Eugène ; car c’est par le péché qu’elle est entrée dans le monde. — Il ne m’importe guère, lui dis-je, par où elle y est entrée ; ce que je lui demande, c’est de ne pas m’en faire sortir si brusquement. — J’ai quarante volumes à écrire, et quarante mille choses à dire et à faire, que toi seul au monde, mon cher Eugène, pourrois dire et faire pour moi. Tu vois comme elle m’a déjà pris à la gorge ; (en effet, je pouvois à peine me faire entendre d’Eugène à travers une petite table). — Tu vois que je ne suis pas un champion de sa force en champ clos. — Ne ferois-je pas mieux, tandis qu’il me reste encore quelques esprits épars, et que ces deux jambes (soulevant une des miennes) et que ces deux jambes d’araignée peuvent encore me porter, — ne ferois-je pas mieux de gagner pays, et de chercher mon salut dans la fuite ? — C’est mon avis, mon cher Tristram, dit Eugène.