Aller au contenu

Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/260

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

au statuaire ? La nature lui auroit-elle révélé son secret ?

Ô nature ! tes ouvrages effacent tous ceux de l’art. — Jeanneton est belle sans connoître les faces et les tiers de face. — Elle est belle comme toi et par toi… — Mais que son attitude est heureuse ! Saisissons cet instant pour la peindre ; c’en est fait, je tire mes crayons ; — et puissé-je n’en faire usage de ma vie, si je ne viens pas à bout de vous montrer Jeanneton aussi au naturel, que si je voyois ses formes à travers un linge mouillé ! —

— Mais ces messieurs préfèrent peut-être que je leur donne la longueur, la largeur et la hauteur de l’église de Montreuil ; — ou le plan de la façade de l’abbaye de Saint-Austreberte ? — Eh, messieurs ! tout y est, je suppose, dans l’état où les charpentiers et les maçons l’ont laissé ; et tout y restera ainsi pendant cent ans encore, si la foi en Jésus-Christ dure aussi long-temps. — Vous pouvez prendre ces mesures-là à votre-aise.

— Mais pour toi, Jeanneton, celui qui veut te mesurer doit s’y prendre à l’heure même. — Tu portes en toi les principes du changement ; et quand je considère les vicissitudes de cette vie passagère, je frémis de l’avenir qui t’attend. — Avant deux ans peut-être,