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Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/287

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russiez-vous dans le plus beau pays, — sur la plus belle route, — et dans la voiture la plus douce possible ; — fussiez-vous assuré de pouvoir dormir l’espace de vingt lieues sans ouvrir l’œil une seule fois : — bien plus — vous fût-il démontré aussi clairement qu’une proposition d’Euclide, que vous seriez, à tous égards, aussi bien, et peut-être mieux endormi qu’éveillé ; — l’obligation de payer, qui revient à chaque poste, et la nécessité de fouiller dans votre poche, pour en tirer, sou par sou, trois livres quinze sous, sans compter les guides, — s’opposent tellement à l’envie que vous auriez, que (quand il iroit du salut de votre ame) il vous est impossible de dormir plus de deux lieues de suite, ou de trois tout au plus, en supposant qu’il y ait poste et demie.

« Parbleu ! dis-je, je vois un moyen. Je mettrai la somme précise dans un morceau de papier, et je la tiendrai dans ma main pendant tout le chemins. — Là-dessus, je m’arrangerai pour dormir. — « Je n’aurai, dis-je, autre chose à faire qu’à glisser doucement mon argent dans le chapeau du postillon, sans proférer un seul mot. »

Bon ! — Il lui faut deux sous de plus pour boire ! — Ou bien il y a une pièce de douze