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Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/45

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» Où sont Troye et Micènes, et Thèbes et Délos, et Persépolis et Agrigente ? continua mon père, en ramassant son livre de poste qu’il avoit laissé tomber. — Que sont devenues, frère Tobie, Ninive et Babylone, Cizicum et Mitilène ? Les plus belles villes qu’ait jamais éclairées le soleil, maintenant ne sont plus ; — leurs noms seulement sont demeurés ; et ceux-ci, (car déjà plusieurs d’entre eux s’écrivent incorrectement), s’en vont eux-mêmes par lambeaux ; et dans le laps du temps ils seront oubliés et enveloppés avec toutes choses dans la nuit éternelle. — Le monde lui-même, frère Tobie, le monde lui-même finira.

» À mon retour d’Asie, dans ma traversée d’Égine à Mégare, — (dans quel temps donc ? pensa mon oncle Tobie), je jetai les yeux autour de moi. — Égine restoit derrière, Mégare étoit devant, Pirée à main droite, et Corinthe à main gauche. — Que de villes jadis florissantes, et maintenant couchées dans la poussière ! — Hélas ! hélas ! dis-je en moi-même, quel homme pourroit permettre à son ame de se troubler pour la perte d’un enfant, quand il voit de telles merveilles honteusement ensevelies ? — Ressouviens-toi, me