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Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/69

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Et cette défiance modeste et habituelle de ton propre jugement, qui fait que tu ne t’échauffes jamais, au moins pour des sujets qui n’en valent pas la peine ! — Oh ! pour mon jugement, il m’a si souvent trompé, que je serois un sot de me fier à lui. —

Et cet amour, ce respect pour la vérité, qui te conduiroit au bout du monde pour la retrouver, quand tu crois l’avoir perdue ! — Oui, j’aime la vérité ; mais je hais encore plus la dispute. — Et si cette vérité n’intéresse ni la religion ni la société, j’aime mieux l’abandonner lâchement, et souscrire aux opinions les plus extravagantes, que d’entrer en lice pour les attaquer. —

D’ailleurs, je crains le mal par-dessus tout ; — et il n’y a pas d’opinion si sacrée, que je voulusse me laisser égratigner pour elle. Aussi me suis-je de tout temps promis de ne jamais m’enrôler dans aucune armée de martyrs, soit que l’on en lève une nouvelle, soit que l’on se contente de recruter l’ancienne.

Mais il est temps que je retire ma mère de l’attitude pénible où je l’ai laissée.