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Page:Sterne - Œuvres complètes, t5-6, 1803, Bastien.djvu/102

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j’avois oublié tout ce qu’elle m’avoit dit… Je regardai derrière moi, et je la vis qui étoit encore sur le pas de sa porte pour observer si je prendrois le bon chemin. Je retournai vers elle pour lui demander s’il falloit d’abord aller à droite ou à gauche… J’ai tout oublié, lui-dis-je. Est-il possible ? dit-elle en souriant. Cela est très possible, et cela arrive toujours quand on fait moins d’attention aux avis que l’on reçoit, qu’à la personne qui les donne.

Ce que je disois étoit vrai, et elle le prit comme toutes les femmes prennent les choses qui leur sont dues. Elle me fit une légère révérence.

Attendez, me dit-elle en mettant sa main sur mon bras pour me retenir, je vais envoyer un garçon dans ce quartier-là porter un paquet ; si vous voulez avoir la complaisance d’entrer, il sera prêt dans un moment, et il vous accompagnera jusqu’à l’endroit même. Elle cria à son garçon, qui étoit dans l’arrière-boutique, de se dépêcher, et j’entrai avec elle. Je levai de dessus la chaise où elle les avoit mises, les manchettes qu’elle brodoit, dans l’intention de m’y asseoir ; elle s’assit elle-même sur une chaise basse, et je me mis aussitôt à côté d’elle.