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Page:Stevenson - L’Île au trésor, trad. Varlet.djvu/255

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LE CAPITAINE SILVER

parole amicale. Vous voudrez bien vous souvenir que ce n’est plus seulement ma vie, mais celle de ce garçon qui est en jeu à présent ; et vous allez me parler gentiment, docteur, et me donner un peu d’espoir pour continuer, par pitié.

Une fois là dehors et le dos tourné à ses amis et au blockhaus, Silver était un homme tout nouveau ; ses joues semblaient creuses et sa voix tremblait ; il parlait avec un sérieux absolu.

— Voyons, John, vous n’avez pas peur ? lui demanda le docteur Livesey.

— Docteur, je ne suis pas lâche ; non certes… Pas même pour ça (et il claque des doigts). D’ailleurs, si je l’étais, je n’en parlerais pas. Mais je dois reconnaître que je frissonne à l’idée de la potence. Vous êtes un homme sage… un vrai ; je n’ai jamais vu plus sage ! Et vous n’oublierez pas ce que j’ai fait de bien, pas plus que vous n’oublierez le mal. Et je me retire, comme vous voyez, et je vous laisse en tête à tête avec Jim. Et vous témoignerez de cela aussi en ma faveur, car c’est aller loin, certes.

À ces mots, il se recula de quelques pas, de façon à ne plus nous entendre, et s’asseyant sur une souche, se mit à siffler. Il se retournait de temps à autre sur son siège, de façon à nous surveiller, le docteur et moi, alternativement avec ses ingouvernables forbans, qui faisaient la navette sur le sable, entre le feu qu’ils s’occupaient à rallumer, et la maison d’où ils rapportaient du lard et du biscuit pour le déjeuner.

— Ainsi, Jim, me dit tristement le docteur, vous voilà ici. Le vin que vous avez tiré il faut le boire, mon garçon. Dieu sait que je n’ai pas le cœur de vous faire de reproches, mais que cela vous plaise ou non, je vous ferai remarquer ceci : quand le capitaine Smollett était bien portant, vous n’avez pas osé