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Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/45

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en réalité être appelés les enfants. Cependant nous préférons, maintenant comme avant, les honorer comme « nos bons anciens ». Mais comment sont-ils parvenus à vieillir et qui donc a pu par sa prétendue nouveauté les repousser dans le passé ?

Nous connaissons bien le novateur révolutionnaire et l’héritier irrespectueux qui enleva au Sabbat de ses pères le caractère sacré pour en doter son Dimanche et qui interrompit le temps dans sa course pour se prendre comme point de départ d’une nouvelle chronologie. Nous le connaissons et nous savons que c’est le Christ. Mais demeure-t-il éternellement jeune, est-il encore l’homme nouveau, ou bien est-il devenu antique après avoir lui-même refoulé dans l’antiquité « les anciens ».

Ainsi les anciens ont eux-mêmes engendré le jeune homme qui devait les exclure. Examinons comment se fit cette conception.

« Pour les anciens le monde était une vérité » dit Feuerbach, mais il oublie cette addition capitale : une vérité dont ils cherchaient à trouver la non-vérité et que finalement ils découvrirent effectivement. On comprendra facilement le sens de ces paroles de Feuerbach si on les rapproche de la parole chrétienne sur « la vanité et l’instabilité du monde ». De même que le chrétien ne peut jamais se convaincre de la vanité de la parole divine, mais croit à l’éternelle et inébranlable vérité de cette parole, qui à mesure qu’on en pénètre les profondeurs doit apparaître au jour plus éclatante et plus triomphante, de même les anciens de leur côté vivaient dans le sentiment que le monde et les rapports du monde (par exemple les liens du sang) étaient dans le Vrai devant quoi leur Moi impuissant devait s’incliner. Or justement les plus hautes valeurs de l’antiquité sont