Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/487

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conséquente d’une pensée, d’une idée, d’un esprit, la critique « propre » n’a souci de rien d’autre que de ma jouissance personnelle. Mais en cela, et nous ne lui épargnerons pas l’affront, cette dernière égale la critique animale de l’instinct. Pour moi, comme pour l’animal qui exerce sa critique, il ne s’agit que de moi, non de la chose. Je suis le criterium de la vérité, mais Je ne suis pas une idée, Je suis plus qu’une idée, c’est-à-dire inexprimable. Ma critique n’est pas « libre », elle n’est pas libre de moi et elle n’est pas tributaire, elle n’est pas au service d’une idée, elle est ma critique propre.

La critique, vraie ou humaine, se borne à reconnaître si une chose convient à l’homme, à l’homme vrai, tandis que par ta critique propre tu découvres si elle te convient.

La critique libre s’occupe d’idées et est par suite constamment théorique. Elle peut déployer ses fureurs contre l’idée, elle ne s’en dégage pas. Elle se bat avec des fantômes, mais elle ne le peut que si elle les tient pour fantômes. Les idées auxquelles elle a affaire ne disparaissent pas complètement : la brise du matin ne les met pas en fuite.

Certes le critique peut en venir à l’égard de l’idée à l’ataraxie, mais il n’est jamais affranchi, c’est-à-dire qu’il ne concevra jamais qu’il n’existe pas quelque chose de supérieur à l’homme corporel, par exemple l’humanité, la liberté, etc. Pour lui il reste toujours une « mission » à l’homme : l’humanité. Et cette idée d’humanité demeure irréalisée, parce que précisément elle reste et doit rester « idée ».

Si je conçois au contraire l’idée comme mon idée, elle est déjà réalisée parce que je suis sa réalité : sa