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Page:Suarès - Sur la mort de mon frère.djvu/129

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leurs : c’est l’étendue d’amour et toute la durée.

Lui. — La mort le franchit d’un seul bond. Elle est, d’un coup, sur l’être qu’elle frappe. Où est tant d’amour, et tant de force ? Où, cette pensée ? Que tout est loin sur ce fleuve dévorant. Nul espoir de remonter vers la source. Tout est nul, tout est achevé ; tout tombe au vide, dans le vent de la mort. La souffrance seule persiste à se connaître. Je regarde ce que je suis : mon cœur, désormais, est hors de moi.

Moi. — Ô merveilleuse amitié, qui se déchire et place le plus pur de sa tendresse sur l’étal. Elle palpite, blessée.

Lui. — C’est l’amitié des frères, quand le même sang nourrit la même pensée. Plus que veuf, plus qu’orphelin, plus que privé d’enfants gardés sous l’aile : dé-