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Page:Suarès - Sur la mort de mon frère.djvu/221

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certes : tout amour est maternel, dans la pitié.

Je ne L’ai point connu sans sa chair. Je L’ai perdu avec elle. Je vois sa belle poitrine, large et maigre, où telle roue a broyé ses os fins : ils étaient tendres. Je vois les vêtements qui ne L’ont pas défendu, que les pleurs de son sang ont trempés.

Ha, quelle pitié me prend de toute vie, de cette chair si fragile, qui fructifie dans la gaine d’un pauvre corps de femme. Jusqu’ici, je voyais un mourant dans chaque homme ; et maintenant, en chaque homme, je vois le mort qu’on aime.