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Page:Sue - Les Fils de famille (1856).djvu/333

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LXVII

Maurice, abasourdi de la soudaine résolution de madame Dumirail, lui dit avec un accent de surprise profonde :

— L’ai-je bien entendu, ma mère, vous songeriez à déjà quitter Paris ?

— Mon fils, écoutez-moi, — reprit madame Dumirail d’une voix grave et émue, sans répondre à l’interrogation de Maurice. — Je ne vous demanderai pas où vous avez passé la nuit, je ne vous parlerai pas de vos projets de folle dissipation, entre autres de cet achat de deux chevaux du prix de onze mille francs et plus. Non, je me tairai, je ne vous ferai aucun reproche. Je vous dirai seulement et simplement ceci : Mon fils, vous êtes malade, dangereusement malade ; il faut avant tout et au plus tôt vous guérir ; vous enlever à une atmosphère malsaine, corrompue, mortelle peut-être. Voilà pourquoi, avant deux heures, nous aurons quitté Paris.

— Si je vous comprends bien, ma mère, vous et Jeane vous voulez retourner au Morillon ?

— Oui, nous retournons dès aujourd’hui au Morillon, moi, Jeane et vous.

— Moi ?

— Vous.

— La volonté de mon père est formelle ; il désire que j’embrasse la carrière diplomatique, et…

— Vous renoncerez à la carrière diplomatique, voilà tout ; il n’y aura pas grand mal à cela.

— Pardon, mon père désire que je suive cette vocation.

— Nous trouverons votre père au Morillon ; il approuvera le parti que je prends.

— Mais, encore une fois, je…

— Vos objections, mon fils, sont complétement inutiles ; je ne leur accorderai pas la moindre attention, parce que vous ne jouissez pas, quant à présent, de la plénitude de votre raison.

— Permettez, ma mère, je…