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Page:Sue - Les Fils de famille (1856).djvu/373

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le seul qui puisse arracher ma fille à l’infernale obsession de San-Privato ! Ah ! cet homme… cet homme, une fois encore, il me fait rêver le meurtre !


IV

Madame Dumirail s’entretint longtemps avec Charles Delmare, et lui raconta tous les événements survenus dans l’intimité de la famille depuis son arrivée à Paris. À ces confidences, il répondit par les conseils suivants :

— Toujours tenter d’agir sur Maurice par la persuasion, par la tendresse ; faire appel à son cœur et aux souvenirs de sa première jeunesse, si paisible et si heureuse ; se garder surtout de froisser l’ombrageuse susceptibilité de Jeane ; enfin, témoigner à San-Privato tant d’éloignement, qu’il suspende ses visites, et, au besoin, lui fermer la porte.

Charles Delmare, à ce sujet, ne cacha pas à madame Dumirail, qui les ignorait, les détails de l’ascension au col de Tréserve et l’audacieux aveu de San-Privato, afin que la noire scélératesse de ce dernier ne fût plus douteuse pour madame Dumirail. Enfin, il s’efforça surtout de combattre chez elle sa froideur croissante envers Jeane, mit en valeur les généreuses qualités qui la distinguaient, et affirma qu’à cette heure encore le bonheur de l’avenir de Maurice dépendait de son prompt retour au Morillon et de son union avec sa fiancée. Laissant ainsi madame Dumirail quelque peu rassurée, Charles Delmare lui promit de ne pas se borner aux conseils, d’y joindre, s’il le pouvait, l’action. Il devait revenir dans la journée ou dans la soirée, s’il découvrait quelque chose de nouveau ou de grave au sujet de Maurice ; et, en cherchant à se remémorer qui pourrait, parmi ses anciens compagnons de plaisir, le renseigner sur plusieurs points importants à ses yeux, Charles Delmare se rappela Richard d’Otremont, de qui, nous l’avons dit, il avait autrefois protégé les débuts dans la fashion parisienne, et il alla s’informer de la demeure de son ancien pu-