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Page:Sue - Les Fils de famille (1856).djvu/394

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— Monsieur reverra demain cette dame.

— Bien vrai ? — balbutia Maurice avec la stupidité confiante de l’ivrogne ; — bien vrai, An…… toinette ?

— Oui, monsieur ; mais, ce soir, il faut aller vous coucher.

— Je… veux… bien… parce que… la tête… oh ! la tête… et puis… Antoinette…

— Allons, monsieur, appuyez-vous sur moi et sur mon camarade, — reprit le garçon. — Courage ! il n’y a qu’un étage à descendre.

Maurice, trébuchant et manquant de tomber à chaque marche, descendit à grand peine l’escalier malgré l’appui des deux garçons, et il fut par eux soulevé, puis placé dans un fiacre, où il s’affaissa sur lui —même.

— Rue de l’Université, hôtel des Étrangers, — dit au cocher l’un des garçons. — Vous ferez bien de sonner et d’éveiller le portier de l’hôtel avant de déposer ce monsieur dans la rue, car il risquerait d’y passer la nuit.


VII

Pendant que l’on reconduisait, à l’hôtel des Étrangers, Maurice ivre et sans conscience de lui-même, son père, M. Dumirail, que l’on n’attendait pas sitôt, était, durant la soirée, arrivé à Paris, et il s’entretenait avec sa femme. Celle-ci venait de l’instruire des événements domestiques survenus dans la liaison de Maurice avec madame de Hansfeld jusqu’à la retraite de Jeane chez sa tante, madame San-Privato ; enfin, madame Dumirail, selon son habitude de ne rien taire à son mari, l’avait instruit du triste secret de Charles Delmare. Le récit minutieux de ces faits si graves, si alarmants, dura longtemps. Madame Dumirail, craignant l’explosion de la colère de son mari contre son fils, s’efforça d’atténuer les actes les plus répréhensibles de celui-ci, insista beaucoup sur sa bonne et sincère résolution de retourner au Morillon, résolution malheureusement abandonnée par suite de la