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Page:Sue - Les Fils de famille (1856).djvu/423

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bres du comité d’admission de notre club. Tout s’est d’abord parfaitement passé ; mais, justement blessé par une impertinence de madame de Hansfeld, j’ai…

M. d’Otremont, craignant d’en avoir trop dit, se reprit et poursuivit ainsi :

— Une impertinence de M. Maurice Dumirail, quelque peu animé par le vin, m’a blessé ; nous avons échangé des mots fort vifs, il a fini par me menacer de me souffleter ; je lui ai répondu en lui jetant ma serviette au visage. Telles ont été les causes de ce malheureux duel, inévitable, vous le voyez, ce dont je suis doublement aux regrets maintenant, puisque vous affectionnez beaucoup ce jeune homme ; mais, vous en conviendrez, mon cher Delmare, la gravité de l’insulte exige inexorablement une réparation par les armes.

Charles Delmare avait remarqué ces mots, échappés à M. d’Otremont, et presque aussitôt retirés que prononcés par lui : « Blessé d’une impertinence de madame de Hansfeld. » Or, aux yeux de Charles Delmare, il résultait logiquement de l’aveu involontaire de M. d’Otremont : 1° que, blessé d’une impertinence de madame de Hansfeld, il avait dû y répondre vivement ; 2° que, Maurice ayant pris fait et cause pour sa maîtresse, la discussion, ainsi devenue de plus en plus irritante, s’était terminée par des offenses réciproques. La certitude presque absolue de ces faits, rapprochée de l’astucieuse scélératesse de San-Privato, et de l’embarras ou des réticences de Richard au sujet de la véritable cause du duel, mit Charles Delmare sur la voie de la vérité. Après un nouveau silence, il reprit :

— Mon cher Richard, j’étais bien inspiré en vous affirmant que l’intérêt de votre honneur me guidait dans les questions que je vous adressais.

— Vous l’avez dit… je vous ai cru.

— Je vais vous le prouver, mon ami, et d’abord il est urgent que vous soyez instruit de certains faits. Le premier, le plus capital de tous, est que San-Privato a pour cousin germain Maurice Dumirail.

— J’ignorais cette parenté ; mais je ne comprends pas en quoi il m’importe de savoir…

— Attendez… San-Privato a été et est sans doute encore fort épris d’une jeune fille que doit épouser Maurice Dumirail.

— Soit ; mais, je vous le répète, mon cher Delmare, je ne vois pas ce qu’il y a d’important pour moi dans ces détails.

— Vous allez le connaître ; je terminerai en disant… et pesez