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Page:Sue - Les Fils de famille (1856).djvu/50

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lui seyait à ravir. Ces symptômes de coquetterie naïve n’échappèrent pas à M. et à madame Dumirail. Ils adressèrent un regard d’intelligence à Charles Delmare, qui contemplait avec un ravissement contenu la beauté de sa fille… Jamais elle ne lui avait semblé plus charmante.

— Mon Dieu ! chère Jeane, comme tu deviens coquette ! — dit affectueusement madame Dumirail ; — c’est la première fois que je te vois coiffée avec des fleurs naturelles… Tu as eu là une excellente idée… cette coiffure te va fort bien !

À son tour, et comme Maurice, la jeune fille baissa les yeux, rougit, se troubla, redoutant d’avoir imprudemment trahi, par la recherche inusitée de sa parure, le secret de son cœur ; aussi commit-elle un énorme mensonge en répondant :

— J’ai eu l’idée de me coiffer ainsi… à cause… à cause… de l’arrivée de ma tante San-Privato…

— Tu as eu raison, c’était une gracieuse manière de fêter sa venue, chère enfant ! Allons donc à sa rencontre et précède-nous, car tu es la plus ingambe, — reprit madame Dumirail.

Puis elle dit à demi-voix à son mari et à Charles Delmare :

— Décidément, je suis bien près d’être tout à fait de votre avis et de dire, comme vous : « Il faut marier ces enfants le plus tôt possible. »


VII


Le jour touchait à sa fin lorsque Charles Delmare, M. et madame Dumirail, Jeane et Maurice, groupés devant la porte principale du Morillon, s’apprêtaient à recevoir madame San-Privato et son fils.

Bientôt s’arrêta devant le perron une vieille calèche attelée de trois chevaux de poste et fermée par des vasistas, espèce de melonnière (selon le langage des postillons gouailleurs) nullement construite pour le voyage et déjà disloquée par les cahots de la route. Ce véhicule avait été loué à Paris pour la circonstance par madame San-Privato. Un domestique, assis sur le siége de la voi-