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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 13.djvu/64

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millions le revenu net ; la dette exigible se montait à cent dix millions ; les anticipations sur les revenus futurs dépassaient cent soixante et un millions ; enfin l’année 1770 était absorbée d’avance, ainsi que les deux premiers mois de l’année 1771. — Les banquiers et les traitants refusaient de nouvelles avances pour l’année 1770. L’énergique opposition des Parlements ne permettait pas de recourir à de nouveaux emprunts sans risquer d’exaspérer l’opinion publique. Il fallait donc réduire considérablement les dépenses ou ajouter une ruine à tant de ruines en déclarant encore la banqueroute. L’abbé Terray prit un moyen terme, opéra quelques économies sur le service de la maison du roi, et fit partiellement banqueroute, ainsi qu’il suit : Le 7 janvier 1770, il suspend l’amortissement pour huit ans et applique ses fonds au rétablissement des anticipations. Il convertit les tontines en rentes viagères (spoliation évaluée à plus de cent trente millions), réduit l’intérêt au taux de deux et demi pour cent et ouvre un emprunt de cent soixante millions sur l’Hôtel de Ville. Enfin, deux emprunts forcés, l’un de vingt-cinq millions sur les fermiers généraux, l’autre de vingt-huit millions sur les secrétaires du roi et autres officiers royaux, offrent une ressource momentanée à l’abbé Terray ; il complète ces mesures en remplaçant les dépôts en espèces, dits fiduciaires, par des effets du trésor, papier-monnaie absolument discrédité. À l’aide de ces moyens arbitraires, spoliateurs, oppressifs, l’abbé rétablit en apparence et momentanément l’équilibre des recettes et dépenses en 1770. La cour applaudit, mais l’opinion publique s’indigne et se révolte. D’incalculables intérêts étaient froissés, brisés par les opérations de l’abbé Terray ; une désastreuse perturbation dans les affaires commerciales, des faillites sans nombre, des suicides ne prouvèrent que trop l’impuissance et l’iniquité du système de ce prêtre. En vain le Parlement formule remontrances sur remontrances, le chancelier Maupeou n’en tient nul compte, et son âme damnée, l’abbé Terray, continue de recourir à ses funestes expédients grâce à l’appui de la