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Page:Sue - Les misères des enfants trouvés III (1850).djvu/121

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Un coup de sonnette discret, timide, interrompit Balthazar ; le tailleur était sorti, je refermai la porte de la chambre de mes maîtres, et j’allai ouvrir.

C’était la Levrasse.

— M. le comte de Mareuil ? — me demanda-t-il d’une voix doucereuse, et il me parut jeter un coup d’œil rapide et investigateur dans la pièce où nous nous trouvions.

— C’est ici, Monsieur, — répondis-je. — Si vous voulez attendre, je vais aller prévenir M. le comte…

Et laissant la Levrasse seul, j’entrai dans la chambre voisine.

— C’est le marchand de jouets d’enfants, — dis-je à mes maîtres…

— Il n’a pas manqué à sa promesse… bon augure, excellent augure, — dit le poëte à voix basse.

Loin de partager le joyeux espoir que l’arrivée de la Levrasse inspirait au poëte, Robert parut inquiet, pensif, et, au grand étonnement de Balthazar, il lui dit d’un air contraint :

— Mon ami, laisse-moi seul avec cet homme.

— Seul… avec le marchand de jouets ? — dit Balthazar.

— Oui.

— C’est singulier… tu ne m’avais pas dit…

— Mon ami… si je te demande de te retirer, — reprit Robert de Mareuil… — c’est que le secret m’est indispensable… Excuse-moi…

— À la bonne heure, Robert, à la bonne heure… — dit le poëte désappointé. — Après cela un peu de mystère ne nuit pas à l’effet d’un drame… va pour le mystère.

— Il y a là… de quoi écrire ? — ajouta Robert.

— Tu veux dire… de quoi signer… — reprit le poëte en souriant. — Oui… tiens, voici la tasse et la plume… Allons, viens, Martin.

Nous sortîmes ; la Levrasse nous remplaça auprès de Robert de Mareuil. Je fermai la porte sur ces deux personnages.

— Pourquoi, diable ! Robert me renvoie-t-il ? — dit le poëte en se parlant à lui-même, dès que lui et moi nous fûmes seuls dans la pièce qui servait d’antichambre.

Puis Balthazar se mit à se promener silencieusement en long et