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Page:Sue - Les misères des enfants trouvés III (1850).djvu/124

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— Oui, Monsieur…

— J’en étais sûr, — dit le buraliste, — car, ordinairement, c’est sur ce papier-là que les jeunes gens apprennent l’écriture commerciale… Ils en font comme cela beaucoup de petits cahiers… Hélas !… que de papier perdu ! — ajouta le buraliste d’un air narquois en me rendant ma monnaie.

Je ne compris pas alors l’épigramme, assez juste d’ailleurs, et je revins en hâte chez mon maître.

Je trouvai Balthazar vers le milieu de l’escalier.

— Les timbres ! les timbres ! — s’écria-t-il.

— Les voilà, Monsieur.

— Bon… Maintenant, cours rue Grange-Batelière, il y a là un loueur de voitures ; tu lui commanderas pour midi un coupé, tout ce qu’il y a de plus soigné, genre anglais ; on ne tient pas à l’argent… que la voiture soit à midi à notre porte… Tu entends bien ?

— Oui, Monsieur.

Et je repris ma course. Ma livrée inspira toute confiance au loueur de carrosses ; il me proposa une très-belle voiture ; j’acceptai, et je retournai chez mes maîtres.

La Levrasse avait disparu, Balthazar était de plus en plus radieux, mais Robert me semblait pensif.

— Y a-t-il un changeur dans cette rue ? — me demanda Balthazar ?

— Oui, Monsieur, — lui dis-je, — il y a un horloger qui tient un change…

— Cours donc changer ce billet de mille francs pour cinquante pièces d’or… tu payeras l’escompte, — me dit le poëte.

— Balthazar, — s’écria Robert, en arrêtant son ami au moment où celui-ci allait me donner le billet de banque.

Puis il ajouta quelques mots à l’oreille du poëte.

Robert se défiait de ma probité, car son ami, plus confiant, reprit tout haut :

— J’en réponds… c’est bête… mais honnête ; je connais les hommes.

Puis, me donnant le billet :