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Page:Sue - Les misères des enfants trouvés III (1850).djvu/18

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parchemin où se voyait tracée une couronne royale entourée de signes symboliques.

Mais bientôt j’eus une crainte. Ce portefeuille enlevé par moi, et pour ainsi dire des mains du cul-de-jatte, huit années auparavant, alors que je l’avais frappé au moment où il venait de violer la tombe de la mère de Régina, ce portefeuille avait-il été reconnu par le bandit ? Soupçonnait-il comment cet objet se trouvait entre mes mains ? dans ce cas, voudrait-il se venger de moi ?

Ma position se compliquait. Je n’osais appeler, j’éprouvais une invincible répugnance à me vêtir des habits posés sur mon lit, habits volés, sans doute… Pourtant, que faire ? La seule pensée de rester dans cette maison m’effrayait. J’essayai de retrouver mes haillons, en vain je les cherchai parmi les objets dont la chambre était encombrée. Je vis là une réunion des objets les plus hétérogènes : des rideaux de soie, des pendules, des chaussures, des morceaux d’étoffes, des habits tout neufs, des châles de femme, des armes anciennes, des douzaines de bas de soie en paquet, des bouteilles de vin ou de liqueur soigneusement cachetées, des statuettes d’ivoire ou de bronze qui me parurent d’un précieux travail, du linge de toute espèce, et je ne sais combien de petites caisses de cigares étiquetées d’une adresse en langue espagnole, tous objets entassés au hasard. Ce rapide inventaire augmenta mes frayeurs ; ces objets devaient être le résultat de vols nombreux, dont le cul-de-jatte était complice ou recéleur ; je voulais à tout prix fuir cette maison, au risque de me couvrir d’habits d’emprunt. Malheureusement la porte était solide et solidement fermée à double tour…

Bientôt j’entendis st porte extérieure du corridor, des pas pesants s’approchèrent, l’on frappa à la porte d’une façon particulière,

Je restai muet, immobile.

On frappa de nouveau et de la même manière… puis, après quelques minutes d’intervalle, je distinguai un léger bruissement sous la plinthe de la porte, et du dehors l’on poussa dans la chambre un petit papier à l’aide d’une lame de couteau longue et acérée ; après quoi les pas s’éloignèrent, la porte du corridor se referma.

Je jetai les yeux sur le papier que l’on venait d’introduire par-des-