Aller au contenu

Page:Sue - Les misères des enfants trouvés III (1850).djvu/22

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

te nourrirai bien… plus tard tu auras ta commission… sur la vente. Ce que tu vois ici n’est rien… j’ai d’autres magasins… et…

— Ah !… vous voulez vous servir de moi pour vendre le fruit de vos vols ?

— Mes marchandises, jeune homme, mes marchandises… tu t’en occuperas d’abord.

— J’aurai donc encore d’autres fonctions ?

— Plus tard, tu iras dans certaines bonnes maisons que je t’indiquerai, présenter des échantillons de cigares de contrebande… et, sous ce prétexte…

— Sous ce prétexte ?

— Ah ! ah ! voilà que ça mord ; tu faisais le dégoûté, pourtant… Eh bien ! sous ce prétexte, tu me rendras de petits services ; je te dirai lesquels.

— Voilà tout ce que vous exigerez de moi ?

— Pour le quart d’heure, oui. Quant aux garanties des offres et des promesses que je te fais, la confiance dont je t’honore te prouve que c’est sérieux.

— Écoutez-moi bien à votre tour. Je vous connais : vous êtes un misérable… vous avez autrefois perdu Bamboche, et parmi bien des crimes encore impunis, sans doute, vous en avez commis un affreux… vous avez violé une tombe !…

— Ce portefeuille… c’est donc cela ? J’avais comme une idée de la chose, — s’écria le bandit avec un sourire farouche et contraint. — Ah ! tu connais celui qui m’a fait manquer ce beau coup ?

— Celui-là, c’est moi.

— Toi !

— Oui, moi. J’étais enfant, alors. Je vous dis cela pour que vous sachiez que je ne vous crains pas, car si, étant enfant, je vous ai à peu près cassé la tête avec une pelle, étant homme je vous la casserai probablement tout à fait avec cette masse de fer. Comprenez-vous ?

— Ah ! c’était toi, — murmura le bandit ; — nous parlerons de cela plus tard.

— Quand vous voudrez, En attendant, vous ne me retiendrez pas