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Page:Sue - Les misères des enfants trouvés III (1850).djvu/224

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gnant d’ébruiter, de compromettre notre mariage… en m’adressant à des personnes de notre monde, j’ai été forcé de m’abaisser jusqu’à demander à ces misérables d’être nos témoins… mais…

Régina, par un mouvement rempli de dignité, se dégagea brusquement des bras de Robert.

Ce n’était plus l’épouvante, mais un étonnement douloureux qui se peignait sur les traits de la jeune fille, et elle s’écria :

— Ainsi… Robert… vous m’avez menti !… vous m’avez avilie !! Convier, comme témoins de notre union, deux misérables… deux infâmes… ainsi que vous le dites… c’est une cruelle insulte, c’est un sacrilège.

Puis se retournant vers le prêtre qui, plongé dans une incroyable stupeur, paraissait croire à peine à ce qu’il entendait, à ce qu’il voyait, Régina lui dit, avec un accent de honte et de douleur navrante.

— Ah !… mon père… pourrez-vous pardonner ?…

— Assez, Mademoiselle, — s’écria Bamboche en interrompant Régina, — assez, je vous en supplie… tout ceci a trop duré pour vous.

Puis il ajouta en s’adressant au prêtre, accompagnant ses paroles d’un geste menaçant :

— Allons vite ! Monsieur le curé, à bas ta défroque ou je te l’arrache… vieille canaille…

En un instant, le faux prêtre eut dépouillé le surplis et l’étole…

Ce faux prêtre était la Levrasse.

— Mon Dieu ! où suis-je ? — s’écria Régina, en proie à une croissante épouvante, — où suis-je ?… mon Dieu, ayez pitié de moi.

Et, éperdue, les mains jointes, suppliantes, elle se jeta à genoux devant l’autel.

— Quoi ! — s’écria Robert à son tour en feignant la surprise et l’indignation, — cet homme serait un faux prêtre !!!

— Pas mal ! — dit Bamboche, — pas mal l’étonnement !

Puis s’adressant à la Levrasse :

— Entends-tu Robert de Mareuil ?… Il ignorait, le pauvre agneau, que tu étais devenu curé… de rencontre.