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Page:Sue - Les misères des enfants trouvés III (1850).djvu/276

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— Martin… tu me méprises…

— Mon maître peut s’éveiller… va-t’en !!

— Écoute-moi…

— Veux-tu nous perdre tous deux ?… Va-t’en, nous sommes quittes !!!

— Tu me crois donc bien lâche ! — s’écria Bamboche en jetant à mes pieds le paquet de billets de banque qu’il avait volés.

J’allais me jeter dans les bras de mon ami d’enfance, lorsque tout à coup un piétinement sourd, rapide, se fit entendre au-dessus de nous, dans la chambre de mon maître, comme si celui-ci se fût précipité à la poursuite de quelqu’un, et nous l’entendîmes crier avec force :

— Au voleur !… au voleur !

Entendant ces cris : au voleur !

— Bamboche ! tu n’étais donc pas seul ? — m’écriai-je.

— Non… le cul-de-jatte est resté en haut… à emplir ses poches…

— Le cul-de-jatte ?

— On lui avait indiqué le vol.

— Qui ?

— Le domestique que tu remplaces.

Je compris alors la signification du plan indicateur trouvé par moi dans le bureau de ma chambre.

Les cris redoublèrent en se rapprochant.

— C’est la voix de mon maître… il est peut-être en danger ; sauve-toi, Bamboche, — m’écriai-je.

Et je me précipitai vers la porte pendant que, d’un bond, Bamboche courut à la fenêtre, qu’il ouvrit.

J’avais fait à peine deux pas dans le corridor, lorsque je fus violemment heurté par le choc du cul-de-jatte, qui s’enfuyait. Je le saisis à bras-le-corps ; mais la peur d’être arrêté doublant ses forces, il se dégagea de mon étreinte, me repoussa violemment dans ma chambre. M’étant heurté contre un meuble, je trébuchai en criant à l’aide.

— Ah ! tu cries, — dit le cul-de-jatte, — et il se précipita sur moi ; je vis luire la lame de son couteau, et presque aussitôt je sentis un rude coup à l’épaule, suivi d’une fraîcheur aiguë. Néanmoins je