cette petite rue d’un quartier perdu, où l’apparition de ma voiture ferait d’ailleurs événement, ce qui me serait fort désagréable, vous irez tantôt chez cette pauvre femme afin de savoir à quel étage elle demeure, et de m’épargner ainsi l’embarras de la demander dans la maison où il n’y a pas de portier, m’a dit l’enfant.
— Faudrait-il annoncer à cette femme la visite de Madame la princesse pour demain ?
— Oui, cela la rendra heureuse un jour d’avance… Vous lui direz que je serai chez elle sur les neuf ou dix heures du matin, — ajouta la princesse après un moment de réflexion.
— Madame la princesse désire-t-elle que je tâche de prendre quelques informations sur cette femme ?
— Cette fois, c’est inutile… je crois tout ce que m’a dit sa petite fille… une enfant de cet âge serait incapable de mentir ou de tromper à ce point.
À cette réflexion de Régina, j’aurais dû, instruit par l’expérience, me souvenir, hélas ! que trop souvent la corruption atteint jusqu’à l’enfance ; mais j’étais loin de prévoir que cet appât tendu à l’âme généreuse de Régina cachait un piège horrible… une machination diabolique…
Cette triste révélation ne viendra que trop tôt.
— Tenez, voici l’adresse de cette pauvre femme, — me dit Régina en me remettant un papier. — Allez d’abord chez Madame Wilson porter ma lettre, puis vous ferez cette autre commission.
Au moment où j’allais sortir, la princesse ajouta avec beaucoup de bienveillance et de dignité :
— C’est grâce aux excellentes recommandations du docteur Clément que je vous donne une preuve de confiance dès le premier jour de votre entrée à mon service ; j’espère que vous y répondrez par votre zèle et par votre discrétion.
— Je ferai tout ce que je pourrai afin de satisfaire Madame la princesse.
Il m’est impossible d’exprimer les mille pensées dont je fus agité