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Page:Sue - Les misères des enfants trouvés III (1850).djvu/328

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qu’il lui fallait relever pour descendre l’escalier, la princesse me remit son bouquet et son mouchoir en me disant :

— Vous me donnerez cela dans la voiture.

En recevant de sa main dans ma main son mouchoir et son bouquet dont le parfum monta vers moi par bouffées, je tressaillis, et je suivis lentement ma maîtresse, la voyant descendre, svelte et légère, les larges degrés de l’escalier de marbre.

Madame Wilson, qui la précédait de quelques pas, s’apercevant que le petit pied de la princesse était seulement chaussé de son soulier de satin blanc, lui dit d’un ton de reproche affectueux :

— Comment, ma chère, par le froid qu’il fait, vous n’avez pas mis de chaussons ?

— Votre valet de pied me les donnera en sortant du bal… — répondit la princesse, — il sera temps alors.

— Et pendant toute la durée de l’Opéra, vous voulez rester les pieds glacés… et à la sortie ?… attendre ainsi notre voiture pendant une heure ? vous auriez un froid mortel… je ne souffrirai pas cela… vous allez mettre vos chaussons à l’instant même… et vous ne les quitterez qu’à notre arrivée au bal.

— Allons… cher tyran, — dit en souriant la princesse à Madame Wilson, — il faut bien vous obéir.

En parlant ainsi, la princesse et son amie s’étaient arrêtées aux dernières marches de l’escalier ; Régina me dit :

— Donnez-moi mon mouchoir et mon bouquet et mettez-moi mes chaussons.

Et prenant de mes mains le bouquet et le mouchoir, Madame de Montbar s’appuya sur l’un des balustres de l’escalier et me tendit son pied.

Je me mis à genoux devant la princesse… Lorsque je pris dans ma main, où il tenait tout entier, ce pied d’enfant chaussé de satin blanc et de bas soie si fins, qu’à travers leur tissu diaphane je voyais la transparence rosée de la peau… d’où s’exhalait une faible senteur d’iris… lorsqu’en attachant la bride du chausson de taffetas mes doigts tremblants rencontrèrent la cheville délicate d’une jambe déliée… lorsqu’enfin les plis traînants de la robe de ma maîtresse effleurèrent mon visage… je crus devenir fou… les artères de mes