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Page:Sue - Les misères des enfants trouvés III (1850).djvu/73

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— Je ne peux pas, Monsieur, il me faut une réponse tout de suite.. Si je ne peux voir aujourd’hui M. le baron, indiquez-moi l’heure à laquelle je pourrai revenir demain.

— A-t-on vu un pareil entêté ? — s’écria le mulâtre courroucé. — Je vous répète que vous ne pouvez voir M. le baron ni aujourd’hui, ni demain, ni après : est-ce clair ?… Une dernière fois, votre lettre, ou allez-vous-en.

— Monsieur le comte Robert de Mareuil, qui m’envoie, — repris-je en observant attentivement les traits du mulâtre, — m’a ordonné de…

Le mulâtre ne me laissa pas achever. Tressaillant au nom de Robert de Mareuil, il s’écria :

— Monsieur de Mareuil est à Paris !  !

J’allais répondre, lorsque le bruit de plusieurs portes qui se fermaient et des pas qu’il entendit derrière lui, firent retourner vivement le mulâtre. Au même instant, je vis sortir du vestibule de la maison un homme, jeune encore, d’une tournure et d’une mise élégantes, d’une figure très-caractérisée, dont l’expression me parut hautaine et dure.

— Monsieur le comte veut-il que je fasse entrer sa voiture dans la cour ? — reprit respectueusement le mulâtre.

Plus de doute, ce personnage était le comte Duriveau.

— Non, c’est inutile, Melchior, — répondit affectueusement le comte.

Puis il ajouta, en continuant de marcher, et tout en descendant le perron :

— Écoutez… J’ai à vous parler…

Et le comte gagna ainsi lentement la porte-cochère, accompagné du mulâtre auquel il parlait bas avec une certaine animation.

Profitant du moment de liberté que le hasard me laissait, je jetai de côté et d’autre des regards furtifs, curieux, inquiets ; Régina habitait sans doute cette maison… je tâchai de plonger mon regard au delà du vestibule d’où était sorti le comte Duriveau, mais je ne pus rien distinguer.

Soudain dans l’intérieur du rez-de-chaussée de la maison dont