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Page:Sue - Les misères des enfants trouvés IV (1850).djvu/247

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votre prison et même malgré votre malédiction… si vous osez me la donner sans rire aux éclats comme cette fois où vous m’avez dit : — Je te maudis, fils indigne… qui tombes sous la table à la cinquième bouteille… Sur ce, Monsieur… moi et Madame nous ne vous retenons pas.

Le comte, qui avait rougi et pâli tour à tour pendant que Scipion parlait avec cette sacrilège audace… le comte ne répondit pas un mot, tira sa montre de son gousset, y jeta les yeux et dit froidement à son fils :

— Il est trois heures… je vous ordonne d’être chez moi à six heures… Et je vous déclare que vous y serez… de gré ou de force… Vous sentez bien qu’on vient toujours à bout d’un écolier rétif. Ainsi donc… à six heures… et n’y manquez pas.

Ce disant, le comte sortit, laissant, par comble de dédain, Scipion avec Basquine.

En quittant la maison, M. Duriveau, avant de remonter dans sa voiture qui s’était rangée derrière le cabriolet de Scipion, fit un signe d’appel à deux hommes trapus, vigoureux, portant de vieux paletots d’une couleur douteuse et d’énormes cannes plombées ; ces deux agents de police qui s’étaient jusqu’alors promenés dans la rue sans quitter des yeux la porte de la maison de Basquine, s’empressèrent de se rendre auprès du comte.

— Redoublez de surveillance, — leur dit-il ; — que personne ne sorte sans être examiné attentivement ; mon fils peut tenter de s’échapper sous un déguisement.

— Soyez tranquille, Monsieur le comte, — dit l’un des deux agents, — nous avons bon pied, bon œil.

— Si à six heures mon fils n’a pas quitté cette maison, — reprit le comte, — l’un de vous ira requérir l’assistance d’un magistrat pour entrer dans cette demeure, où vous arrêterez mon fils, que vous conduirez chez moi avant de le mener en prison.

— C’est entendu, Monsieur le comte.

— S’il sort avant six heures, vous lui déclarerez qu’il vous accompagne chez moi, ou que sinon vous le conduirez immédiatement à la Conciergerie.

— Oui, Monsieur le comte.

— Vous vous êtes précautionnés d’un fiacre ?

— Oui, Monsieur le comte, le voilà là-bas…

— Et… — ajouta M. Duriveau, sans pouvoir cacher une im-