Aller au contenu

Page:Sue - Les misères des enfants trouvés IV (1850).djvu/52

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Eh ! qu’est-ce que ça me fait ! j’en trouverai d’autres… — s’écria le comte Duriveau dans un paroxysme de fureur : — je vais souffleter le capitaine Just, il faudra bien alors qu’il m’aide à en trouver… des témoins… |

— Ne jouez pas ce jeu-là, — dit l’avocat en ricanant, — vous avez pu vous apercevoir ce matin que le capitaine Just a la poigne solide… Or, si vous aviez le malheur de lever la main sur lui, il aurait l’honneur de vous rouer de coups une seconde fois, et en avant le procès criminel.

— Je consens à tout… — s’écria le comte poussé à bout. — Mais que je me batte au moins.

— Vous allez être immédiatement satisfait. M. le capitaine Just a pensé que, vu la difficulté de trouver un coin convenable pour se couper tranquillement la gorge, le jardin de sa maison… vous pouvez l’apercevoir d’ici… serait heureusement choisi… Tenez, voyez par cette fenêtre. Quant aux armes, nos témoins ont apporté deux paires d’épées de combat…

— Il suffit, Monsieur, — dit le comte Duriveau, reprenant son sang-froid, — j’accepte tout, je consens à tout, pourvu que j’aie enfin une épée à la main… et cet homme devant moi…

 

Le comte Duriveau fit la rétractation convenue, jura sur l’honneur que toute rivalité jalouse était étrangère à la cause de ce duel, amené par suite d’une discussion politique.

La rencontre eut lieu dans le jardin de la maison du docteur.

Le combat fut acharné.

Le comte Duriveau montra une grande bravoure ; quoique blessé d’un coup d’épée à la cuisse, il voulut continuer, et après avoir traversé le bras du capitaine Just, il reçut un second coup d’épée dans le flanc droit, qui le mit hors de combat.

 

Une demi-heure après l’issue de ce duel, je revenais apprendre à Régina que la blessure du capitaine Just était légère.

Le courage de la malheureuse femme l’avait soutenue jusque-là…

Mais bientôt ses genoux se dérobèrent sous elle… je n’eus que le temps d’appeler mademoiselle Juliette, que je laissai avec la princesse.