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Page:Sue - Mathilde, tome 6.djvu/19

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rêve, et revenant à son doux et charmant naturel, elle ouvrit les yeux, et me regarda cette fois avec une expression de tendresse, de repentir, si ingénue, que je ne pus retenir mes larmes.

Elle se pencha vers moi, prit ma main dans les siennes, la porta à ses lèvres, hélas ! froides, bien froides… puis elle la posa sur son sein en me disant :

— Il me semble que la chaleur de votre main va réchauffer mon cœur, qui s’était glacé tout-à-l’heure…

— Emma, vous m’aimez donc bien ?

— Maintenant… oui… après ma seconde mère… je n’aime rien au monde plus que vous…

— Vous n’aimez personne autant que moi… mon enfant ?

— Personne… J’aurais voulu vous ressembler en tout… être vous-même…

— Et pourtant quelquefois… vous me haïssez — dis-je assez vivement.

Elle fit un brusque mouvement, pressa davantage encore ma main sur son cœur, je sentis ses faibles battements s’accélérer un peu.

Emma reprit en souriant douloureusement :