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Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/115

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sur lequel les voitures roulent sans trop de difficultés. Cette remarque avait déjà été faite par Fabre. Tous les soins de l’entretien se bornent à écarter les gros blocs, et à boucher de temps à autre les ornières.

Tel est l’état le plus ordinaire des routes dans les parties où elles traversent les torrents ; et si l’on rassemblait bout à bout ces parties, on formerait, dans l’arrondissement d’Embrun, un développement égal au moins au quart du développement total des routes de l’arrondissement. Cet état doit sembler incroyable, quand on le compare à celui des routes du reste de la France. Ici, l’inconvénient est moins vivement ressenti, parce qu’il ne s’attaque qu’à une petite fréquentation, et aussi parce que l’excellente nature du climat lui oppose une sorte de compensation. Nul doute que si les routes de ce département étaient transportées, avec leurs torrents, sous le ciel humide et pluvieux du Nord, et sillonnées par un roulage actif, elles seraient défoncées au bout d’un mois et rendues totalement impraticables.

On doit voir que les conditions de l’entretien des routes sont bien différentes dans ce département de ce qu’elles sont partout ailleurs. Ce n’est pas le roulage qui use ici les routes ; ce n’est pas l’humidité qui détériore leur empierrement ; ce n’est pas non plus le manque de matériaux qui empêche d’entretenir convenablement la chaussée. Tout au contraire : les matériaux sont abondants et d’excellente qualité ; les routes sont toujours sèches, trop sèches même, car les pluies et l’humidité sont aussi vivement recherchées ici pour maintenir le bon état de la chaussée qu’elles sont redoutées dans le Nord, où elles se présentent comme une cause de dégradation ; enfin, la fatigue du roulage est insignifiante. Les cantonniers ont donc peu à s’occuper de l’entretien de l’empierrement. Mais à la place de ces soins constants et minutieux, qui composent leur service dans les autres départements, ils ont à faire face à des dégradations subites qui ruinent la route sur de grandes longueurs, interrompent souvent la circulation, et appellent inopinément sur le même point le concours d’une grande masse de bras. — Aussi l’emploi des ouvriers auxiliaires est-il indispensable dans ce département. Cela ne fait-il point penser que la question, souvent débattue, sur l’opportunité de ce genre de travailleurs n’est pas susceptible d’une solution générale, et que l’emploi des auxiliaires, pernicieux dans certaines contrées, peut être fort utile dans d’autres, et devenir dans d’autres localités tout à fait indispensable ?